Bibliographie thématique
PREMIÈRES LECTURES EN CHINOIS
Marijana Benesh Weiner, Dominique Groux, Wu Yuying, (Illustrations de Getachew Bernahu),
Premières lectures en chinois (vol.1), L’Harmattan, 2018, 74 pages.

Ce livre, constitué de deux volumes, est destiné aux enfants qui commencent l'apprentissage du chinois à l'école ou à la maison. Ils y découvriront vingt histoires en chinois, avec des traductions en français auxquelles ils peuvent se référer. La difficulté des textes est progressive, ce sont les tournures syntaxiques de base et les temps les plus courants des verbes qui sont utilisés ici. Les enfants prennent ainsi l'habitude de lire des textes relativement longs en chinois et sans se décourager.
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L'enseignement
précoce des langues
Dominique Groux,
L'enseignement précoce des langues, Des enjeux à la pratique, Chronique
Sociale, 1996, 218 pages.

Cet ouvrage
réfléchit aux enjeux du bilinguisme précoce et analyse les résistances
fréquemment rencontrées. Il fait état de diverses réalisations dans le monde en
la matière et explicite les modalités de mise en oeuvre d'un enseignement
précoce des langues pour tous.
L’apprentissage
précoce des langues,
Louis Porcher,
Dominique Groux, PUF, Collection Que sais-je ?, 1998, réédition 2003.
Les langues vivantes incarnent une valeur sociale dont le cours monte très vite
et de manière continue. Elles font désormais partie des savoirs considérés par
tout le monde comme indispensables à une vie simplement ordinaire :
l'internationalisation des professions, le développement des voyages,
l'expansion vertigineuse des médias (que l'on pense à la renaissance brutale de
l'intérêt pour l'écrit à travers l'usage des fax et d'Internet), constituent les
principaux ingrédients de cette banalisation des langues comme compétences de
tous les jours.
Il y a certes,
désormais, bien des manières (autrefois à peine existantes d'apprendre une
langue étrangère : séjours dans le pays, fréquentation des médias, échanges avec
un interlocuteur étranger. Pour l'instant cependant, l'enseignement scolaire
reste la pratique la plus répandue, la plus rassurante, celle en laquelle les
usagers ont le plus confiance malgré la relative faiblesse des résultats qu'elle
obtient. L'apprentissage des langues entraîne, dans ces conditions, un
développement croissant de leur enseignement (au point que celui-ci, en dehors
des institutions officiellement éducatives est devenu un marché).
Une des démarches évidentes pour assurer ce développement consiste à abaisser
l'âge des débuts de l'enseignement/apprentissage. C'est pourquoi, dans un nombre
de plus en plus grand de pays, on commence désormais l'apprentissage d'une
langue à sept ans (comme on le faisait depuis longtemps en Suède par exemple, ou
dans des régions comparables qui ont absolument besoin, quotidiennement, d'une
langue de grande diffusion). L'apprentissage précoce des langues, dans ces
conditions, non seulement s'est imposé mais connaît une expansion d'une rapidité
et d'une ampleur que personne n'avait prévues.
Les auteurs
Dominique Groux
Agrégée de lettres modernes et docteur ès lettres, elle est actuellement
professeur à l’IUFM de Versailles.
Louis Porcher
Agrégé de philosophie et docteur ès lettres et sciences humaines, ancien
directeur du CREDIF, il est professeur à l’université de Paris III Sorbonne
Nouvelle. Il est également expert auprès du Conseil de l’Europe.
Un
article complémentaire :
Dominique Groux, Pour un apprentissage précoce des langues, Le Français dans
Le Monde, novembre-décembre 2003, n°33
On a beaucoup écrit sur
l’apprentissage précoce des langues et sur tous les tons, tour à tour
enthousiaste, inquiet ou profondément angoissé. Dès lors, comment y voir clair
dans le débat relatif à l’apprentissage précoce des langues ou à celui relatif
au bilinguisme ? Le point sur les conditions nécessaires à la réussite d’un tel
enseignement, sur ses avantages et ses enjeux…
Il
est important d’être confronté dès le plus jeune âge à la langue étrangère. Plus
l’apprentissage sera précoce, mieux ce sera pour l’enfant. À trois ans, l’enfant
a toute la souplesse intellectuelle pour imiter, pour apprendre, pour se fondre
dans la langue et la culture de l’autre. À la maternelle, il apprend la langue
étrangère en chantant, en jouant, en réalisant des objets… sans effort. Sur le
mode ludique. C’est un moment exceptionnel où l’enfant est disponible pour
emmagasiner de nombreuses connaissances. Il répète les sons qu’il ne connaît pas
dans sa langue. Il répète sans accent. Il le fait par plaisir.
Dans les pays qui proposent un apprentissage d’une langue étrangère dès la
maternelle comme le Liban ou l’Égypte (écoles privées), l’Italie et la France
dans certaines de leurs régions (Val d’Aoste, Alsace…), on a choisi l’option du
bilinguisme. C’est-à-dire que les activités scolaires se font en général à
parité dans la langue maternelle et dans la langue étrangère. La langue
étrangère n’est donc pas apprise pour elle-même, mais elle est le vecteur
d’enseignements disciplinaires. Elle a ainsi un sens. Elle permet l’accès à
certaines connaissances.
Bien entendu, il ne suffit pas de commencer à apprendre la langue dès l’âge de
trois ans. Il faut poursuivre cet apprentissage tout au long du cursus primaire.
Si l’on veut que l’enfant soit réellement bilingue, il est nécessaire de lui
proposer un enseignement dans sa langue et dans la langue étrangère durant toute
sa scolarité primaire. Cette éducation bilingue ne représente pas de surcharge
de travail pour l’enfant car on ne lui propose pas de cours supplémentaires par
rapport à l’emploi du temps classique mais seulement des enseignements
disciplinaires dans la langue étrangère. Certains pays ont choisi d’enseigner
les disciplines littéraires en langue étrangère (écoles bilingues en Roumanie,
en Allemagne…), d’autres les disciplines scientifiques (écoles bilingues au
Vietnam, en Égypte, en Moldavie…), d’autres l’éducation physique (Seychelles) ou
les disciplines artistiques… Une seconde langue étrangère est rapidement
introduite dans le cursus, en fin de primaire ou dès la première année du
secondaire, ce qui fait que l’élève est trilingue à l’issue de son cursus.
Voici donc rapidement présentées les conditions idéales d’un enseignement
bilingue. Rien à voir avec l’exposition homéopathique à la langue étrangère qui
est proposé aux enfants du primaire en France. Dans ce cas, il ne s’agit pas
bien sûr d’éducation bilingue. Je ne soulignerai pas ici la frilosité de notre
politique en matière d’enseignement précoce des langues. Je l’ai fait en
d’autres lieux*. Je voudrais seulement insister sur les avantages cognitifs
d’une véritable éducation bilingue.
Des avantages cognitifs
Le grand avantage lié à l’éducation bilingue est le fait, finement analysé par
C. Hagège (1996), que le jeune enfant est capable d’entendre et de reproduire à
l’identique les sons des autres langues inconnus de sa langue maternelle et
qu’il n’en sera plus capable à l’âge de dix ans. L’enfant qui aura appris très
tôt une langue étrangère n’aura donc pas d’accent.
Il faut signaler aussi que l’on entre plus facilement dans une langue étrangère
lorsqu’on est tout petit et confiant et que l’on n’est pas encore inhibé par la
crainte du brouillage de son image sociale ni affecté par une construction
identitaire délicate, comme on peut l’être dès l’âge de la pré-adolescence, où
l’on supporte plus difficilement la différence et le regard de l’autre que l’on
imagine délibérément critique.
Si
l’enfant apprend très tôt la langue étrangère dans le cadre d’une éducation
bilingue, il n’aura donc pas d’accent et il ne connaîtra pas les blocages qui
nuisent à l’apprentissage, mais il aura aussi des avantages certains sur le plan
intellectuel et sur le plan de la personnalité.
De nombreuses études ont suggéré l’existence d’un avantage sur le plan
intellectuel lié au développement de la bilingualité.
Par exemple, Peal et Lambert (1962) qui ont comparé, à Montréal, les résultats à
des tests d’intelligence verbale et non verbale, d’enfants bilingues
français-anglais et d’enfants monolingues, âgés de dix ans, ont constaté une
certaine supériorité intellectuelle des bilingues qu’ils attribuent à une grande
« flexibilité cognitive » résultant de l’habitude de passer d’un système de
symboles à l’autre. Ces avantages cognitifs liés au développement bilingue se
retrouvent au niveau des tâches créatives, des habiletés métalinguistiques et de
la créativité verbale.
On a pu constater aussi que l’introduction d’une langue seconde à un âge précoce
entraîne de meilleures performances en langue maternelle à condition que la
compétence en langue maternelle soit déjà élevée au moment de l’exposition à la
langue seconde (Cummins, 1979). De même, une comparaison entre des enfants
bilingues franco-arabes et des enfants monolingues scolarisés dans une même
école française et appartenant au même milieu socio-culturel a montré que les
enfants bilingues avaient des résultats supérieurs en français et en
mathématique (Groux, Porcher, 1998).
Ce dernier constat vient nuancer les conclusions de certains chercheurs comme
Lambert (1977) qui pense que le rapport entre les statuts respectifs des deux
langues du bilingue détermine l’évolution de la bilingualité. L’avantage
cognitif lié au développement bilingue se retrouverait surtout chez les enfants
d’une communauté dominante qui sont scolarisés dans une langue moins
prestigieuse. C’est ce que l’on appelle le bilinguisme additif. La forme
soustractive se retrouverait surtout chez les enfants de minorités
ethnolinguistiques. Ce serait donc le rapport entre les statuts respectifs des
deux langues qui déterminerait l’évolution de la bilingualité.
Cependant, et nous insistons sur ce point, les enfants
bilingues, issus de l’immigration, qui ont la possibilité de pratiquer leurs
deux langues dans le système scolaire, ont des résultats supérieurs à ceux de
leurs collègues monolingues (pour qui le français est la seule langue
d’enseignement) dans ces disciplines si valorisées que constituent le français
et les mathématiques.
Tous les chercheurs qui se sont intéressés au bilinguisme ont reconnu la grande
plasticité du cerveau jeune, capable d’acquérir de nouveaux mécanismes
linguistiques, que l’adulte ne possède plus au même degré. Pour un cerveau
jeune, l’acquisition de deux ou trois langues n’est pas plus difficile que celle
d’une seule. Et il n’est pas nécessaire qu’il y ait traduction ou enseignement
car la langue étrangère s’acquiert spontanément jusqu’à l’âge de six ou sept ans
si l’enfant est immergé dans un milieu où l’on parle une autre langue que la
langue maternelle, ou les deux langues. Le bilinguisme institutionnel peut
représenter ce milieu favorable à l’apprentissage spontané et simultané de deux
langues.
Enfin, il convient de souligner l’importance de l’apprentissage précoce des
langues sur le plan de la personnalité. En effet, comment peut-on mieux éduquer
l’enfant à l’altérité qu’en lui proposant un enseignement des langues étrangères
dès son plus jeune âge ? En découvrant très tôt une autre langue et une autre
culture, l’enfant va acquérir une ouverture intellectuelle et il aura de
meilleures chances de comprendre les autres. Il aura aussi des éléments nouveaux
pour réfléchir à une éthique qui tiendra compte des autres et qui privilégiera
les valeurs d’harmonie et de concorde.
Les enjeux de l’apprentissage précoce
Les langues étrangères représentent aujourd’hui un atout important sur le plan
humain mais aussi sur le plan social. On sait, pour avoir lu Bourdieu, et en
particulier Ce que parler veut dire, L’économie des échanges linguistiques,
qu’elles confèrent un pouvoir symbolique important à ceux qui les parlent. Le
capital linguistique constitué par les compétences en langues étrangères apporte
au locuteur un capital social incontestable, une reconnaissance sociale et un
pouvoir symbolique fort. Les classes privilégiées l’ont d’ailleurs bien compris
qui investissent sans compter dans les séjours linguistiques à l’étranger pour
leurs enfants. Il est donc important de proposer à tous les enfants la
possibilité de maitriser, le plus tôt possible, des langues étrangères pour
qu’ils puissent avoir une chance de s’intégrer à un monde en perpétuel
changement et pour qu’ils puissent mieux le comprendre.
J’émets donc le souhait d’un enseignement bilingue pour tous dès la maternelle,
à l’exemple de ce qui se fait depuis de nombreuses années au Luxembourg qui
pratique même, dès le primaire, l’éducation trilingue (luxembourgeois, français,
allemand) à laquelle il faut ajouter l’anglais dès le secondaire. Ce choix est
intéressant parce qu’il montre une volonté de s’inscrire à la fois dans le
patrimonial (luxembourgeois) et dans l’international (sans le limiter à
l’anglais). On ne renonce pas à son identité, à ses spécificités culturelles,
mais on se tourne aussi vers les autres.
On peut mettre en place cet enseignement dans d’autres pays. On peut le mettre
en place en France. Si les responsables éducatifs sont convaincus de l’intérêt
de former des enfants plurilingues et pluriculturels, des moyens financiers
seront dégagés (une école bilingue coûte une fois et demie plus qu’une école
monolingue), des formations d’enseignants seront mises en place. En ce sens, la
mondialisation représente un formidable espoir pour le plurilinguisme et le
pluriculturalisme.
Dominique Groux, IUFM de Versailles (France)
Bibliographie
Cummins, J., « Cognitive/academic language proficiency, linguistic
interdependence, the optimum age question and some other matters », Working
Papers on Bilingualism, pp. 197-205, 1979.
Groux, D., L’enseignement précoce des langues, des enjeux à la pratique,
Chronique sociale, 1996.
Groux, D., Porcher, L. (1998, rééd. 2003), L’apprentissage précoce des
langues, P.U.F., « Que sais-je ? ».
Groux, D., «
Bekämpfung des Schulversagens durch frühzeitigen Spracherwerb. Die
französisch-arabische Primarschule in der Rue de Tanger in Paris », in
Bildung und Erziehung, Pädagogische Laboratorien, Böhlau, n°51, septembre
1998, pp. 271-278.
Groux, D., « Des conditions favorables pour un enseignement précoce des langues
? », L’apprentissage précoce des langues, in Résonances, Sion, Suisse,
décembre 1999, pp. 3-4.
Groux, D., «
Bekämpfung des Schulversagens durch frühzeitigen Spracherwerb. Die
französisch-arabische Primarschule in der Rue de Tanger in Paris », in
Bildung und Erziehung, Pädagogische Laboratorien, Böhlau, n°51, septembre
1998, pp. 271-278.
Hagège, C., L’enfant aux deux langues, Odile Jacob, 1996.
Lambert, W.E., Peal, E., « The relation of bilingualism to intelligence »,
Psychological Monographs, 76, pp. 1-23, 1962.
Lambert W.E., « Effects of bilingualism on the individual », in Hornby P.A.
(ed), Bilingualism: Psychological, Social and Educational Implications,
New York, San Francisco, London, Academic Press Inc., pp. 15-27, 1977.
[ Dernière actualisation le
25.08.2019 |
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